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En règle générale, les plantations truffières commencent à produire régulièrement entre 10 et 15 ans.

Une production sporadique peut toutefois apparaitre plus précocement mais rares sont ceux qui peuvent récolter avant 9/10 ans.

Lorsque le "brulé" commence à se manifester entre la 4éme et la 7éme année, c'est un signe précurseur : la production commence en général 2/3 ans après.

Il faut noter que l'entrée en production est souvent plus précoce avec le noisetier ou le chêne vert.
 
Le cavage :
La période de production varie selon la variété de truffes attendue.

• Mai à septembre pour la truffe d'été Tuber Aestivum,
• Septembre à décembre pour la truffe d'automne Tuber Uncinatum,
• Décembre à mars pour la truffe d'hiver Tuber Mélanosporum.

Avec une plantation variée et bien organisée, on peut donc presque se régaler de truffes toute l'année !
Quelles que soient les truffes et quel que soit le moyen utilisé pour les détecter, une certitude commune : vous ne les ramasserez pas toutes !

Et c'est même une coutume de ne pas retirer les truffes produites la toute première fois par un plant et pour la même raison, ne pas chercher à récolter absolument toutes les dernières truffes de chaque fin de saison.

En se dégradant dans le sol, il est dit qu'elles amélioreront le potentiel de la production à venir.

Leur parfum si caractéristique et si fort qu'il peut complètement remplir l'atmosphère d'un centre ville en plein air (visitez un marché aux truffes si vous n'y croyez pas !) est cependant tellement diffusé et tamisé par quelques centimètres de terre qu'il faut obligatoirement s'adjoindre un assistant aux sens bien aiguisés pour les découvrir dans leur gîte.

Il s'agit là bien sûr d'une quête précise, d'une "frappe chirurgicale" : la structure du sol et les autres truffes en formation à quelques centimètres ne doivent pas dérangées être par l'opération.
Récolte des truffes : Photo R. Doisneau
C'est primordial car il faut bien savoir que lors du "cavage" (c'est le nom consacré au déterrage des truffes) les liens microscopiques qui la relient aux racines de l'arbre sont irrémédiablement rompus et que sa maturation s'arrête à cet instant.

La truffe ne peut pas se mettre à mûrir au fruitier comme les tomates, les pommes ou les coings.

Les adeptes de la pioche sont avertis : lors d'un bêchage la structure mycorhizienne est détruite pour plusieurs années et sur la totalité des truffes sorties, si quelques unes seront à point, d'autres seront à peine mûres sans presque de goût et le reste totalement immature sans aucun intérêt gustatif ... ni commercial !

On comprend mieux ainsi l'importance des dégâts irréversibles que peuvent faire des visiteurs sans scrupules dans une plantation.

Pour en revenir aux assistants possibles, citons-les par ordre du moins au plus probable :
 
Chercher les truffes "à la marque" :.
La croissance des truffes peut être très rapide durant leur période de grossissement.

En ce qui concerne les truffes noires par exemple ce sont les pluies d'été qui sont le facteur déclenchant.

Après une forte pluie et lorsque la terre reforme une croute au soleil, le développement rapide des truffes affleurantes déforme ou fendille la surface du sol et faisant un petit monticule surplombé d'une craquelure en patte d'oie.
Naturellement la truffe n'est pas encore mûre mais la quantité de ces "marques" renseigne le trufficulteur sur l'intensité et la qualité de la saison à venir.

Il est possible d'en profiter pour glisser quelques grains de céréale tardive (Sorgho par ex.) dans la petite fissure. Ainsi aidé par les quelques grandes tiges qui ne manqueront pas de s'élever, il sera facile de repérer l'endroit exact quand la saison sera venu.

Si le propriétaire du terrain n'est pas l'auteur de la manœuvre, il lui est donc conseillé de supprimer toute marque un peu bizarre et inhabituelle se trouvant dans sa plantation.

Voici une vidéo sur la découverte de ces truffes "à la marque", avec l'aimable autorisation de son auteur "Fly1only" :
Truffes de marque
 
Au cochon, pour l'endurance, l'histoire, la tradition, le folklore ...
A l'époque très répandu dans les campagnes, c'est vers la fin du moyen âge que le porc commence à être utilisé.

Comme le sanglier, l'animal la cherche naturellement pour la consommer : c'est sa gourmandise !

Dans la nature, son cousin sauvage est d'ailleurs un des principaux vecteurs de propagation des spores de la truffe qui résistent extrêmement bien aux sucs intestinaux (ingestion/déjection). Il est également le cauchemar des trufficulteurs ...
Infatigable, il offre l'avantage de ne pas avoir besoin de dressage à proprement dit mais à chaque arrêt il faut être très attentif, vif et rapide car il ne laisse pas beaucoup de temps à son maitre pour se saisir de l'objet de sa convoitise.

Même de petite taille, le cochon est puissant et le dévoyer de son but n'est pas toujours chose facile : l'idéal étant d'être à deux.

Il est d'usage de le tenir en laisse, de se munir d'une canne pour le contenir et d'une grosse musette de mais cuit ou de pommes de terre pour distraire ponctuellement son intérêt.

Facilement apprivoisé, rusé et affectueux c'est quand même un animal qui impose des astreintes dont la société moderne cherche plutôt à s'affranchir.

Nous ne cherchons pas à décourager les volontaires mais il faut garder à l'esprit que l'animal ne reste pas un joli petit porcelet toute sa vie et que, à moins de choisir une race naine, il peut atteindre 250kg et vivre plus de 20 ans en mangeant une dizaine de kilos de pâtée par jour. L'intersaison risque de paraître bien longue ...
 
A la mouche, pour les puristes, la dimension poétique, le fun … la discrétion :
Au moins deux genres de mouches de la même famille se partagent leur goût immodéré pour notre diamant noir : Les "Suillia" et les "Helomyza", qui comptent chacune plusieurs espèces.

Certaines fréquentent davantage les régions méridionales, d'autres sont plus communes en région centrale ou océanique, certaines encore préfèrent le climat continental. Mais que se soit plus grandes ou plus petites, elles partagent toutes le même portrait robot et le même comportement.

D'une taille supérieure à la mouche domestique (de 5 à 14mm), elles sont filiformes avec le corps et les ailes allongées un peu comme une fourmi ailée. Elles sont de couleur rousse, les ailes dorées et de gros yeux orangés aux reflets cuivrés. En étant attentif on peut également remarquer que les cuisses sont épaisses, renflées et qu'une rangée de poils courts et drus garnit la partie supérieure du thorax de la tête à la naissance des ailes.
Sur une truffière il n'y a rarement qu'une mouche, il est même habituel d'en trouver un grand nombre, voire une nuée. Elles sont posées aux alentours sur les feuilles de l'arbre, les touffes d'herbes rases, les pierres.

Pleine des œufs qu'elles s'apprêtent à pondre, elles ont un vol lent et incertain lorsqu'on les dérange et, au sol, sont pataudes et se déplacent par petits sauts courts et maladroits.

De la pointe d'une fine baguette, la technique est de balayer lentement le sol devant soi à l'approche des brulés, de préférence face au soleil pour pouvoir immédiatement détecter l'envol de l'insecte par le miroitement de ses ailes dans la lumière sans l'effrayer de son ombre.

Pour pondre, la mouche se pose à l'endroit ou le parfum de la truffe est le plus fort, donc en théorie au plus prés. En théorie seulement car dans les sols pierreux il n'est pas rare qu'elle soit sensiblement plus loin mais que son odeur enivrante remonte à la surface en suivant des chemins de galeries entre les cailloux.

Après une première recherche et un premier départ, il faut patienter au retour de l'insecte qui marquera de nouveau la direction à prendre.

La mouche est présente malgré le froid de la saison, la brume ou la vapeur d'eau qui s'évapore de la terre après la pluie ne la dérange pas. Moins agréable pour le trufficulteur, ces moments sont malgré tout les plus efficaces car l'insecte est encore un peu engourdi, moins vif et ses déplacements sont réduits. Vers midi le ballet est plus actif …

Utilisable lorsqu'on n'a pas de chien, c'est une méthode qui peut séduire les amoureux de la nature ou ceux qui n'ont que quelques arbres producteurs.

Il faut juste avoir de bons yeux ... et le jour devant soi.

Pour plus d'information sur les mœurs et comportement de cette Diptère, lire cette étude détaillée signée par Rémi Coutin et parue dans la revue "Insectes" éditée par l'INRA :
Truffes et mouches rabassières.
 
Au chien, pour l'animal, sa polyvalence, son efficacité tout simplement :
Le meilleur moyen pour la récolte des truffes reste le chien.

Il n'y a pas de race meilleure qu'une autre : tous les chiens peuvent caver la truffe. Certains la cherchent naturellement comme le Lagotto Romagnolo par exemple, mais un dressage sera néanmoins nécessaire.
Sur le terrain, on voit des caniches, des labradors, des bergers allemands, des épagneuls, des teckels …

Les chiens dits "de chasse" ont souvent été sélectionnés pour la finesse de leur odorat mais, en extérieur, ils ont une réelle tendance à délaisser les truffes pour partir derrière le gibier laissant le trufficulteur seul avec ses soucis.

Les bergers (Allemands, Australiens, Belges …) dont les capacités olfactives sont très utilisées pour détecter les drogues, les explosifs et maintenant les cancers ont leur irréductibles supporters.

Sur le terrain, force est de constater que les animaux de race métissée, trivialement appelés "bâtards", ont un comportement malin et laborieux et font parti des meilleurs chiens truffiers.

La race du chien est donc vraiment secondaire, l'important c'est qu'une grande connivence l'unisse à son maitre car c'est uniquement pour lui faire plaisir qu'il mènera sa quête. Ses qualités doivent être l'obéissance, le calme et l'endurance.
En faisant de petites haltes et sur une matinée, un chien peut rester efficace durant 2 à 3 heures rarement plus. Si on veut continuer l'après-midi, il faut ensuite le laisser passer à autre chose : jouer, se reposer … Sur les grosses plantations, un roulement de plusieurs chiens est donc à prévoir.

On peut trouver des chiens déjà dressés auprès de professionnels canins ou naturellement d'autres trufficulteurs, mais le plus agréable est de le dresser soi-même : c'est un moment unique de complicité avec son compagnon à quatre pattes.

Le dressage est une sorte de jeu basé sur sa gourmandise.

La plupart des chiots aiment le fromage (mais n'importe quelle friandise odorante qu'il aime peut faire l'affaire). Après lui avoir donné à la main, caché dans les pantoufles, sous le tapis, encouragé des mêmes mots que vous utiliserez en cavage ("cherche", "cherche" par exemple) vous dissimulerez ce fromage à l'extérieur, dans le gravier de la cour ou sous quelques millimètres de terre dans le jardin.

Encouragé et guidé par votre voix, il prendra l'habitude de chercher, le nez au sol et de gratter pour trouver.

Au fromage vous associerez ensuite un morceau de truffe et vous enterrerez peu à peu l'ensemble de plus en plus profondément (20cm max. en fin de dressage). Il continuera son jeu en se régalant du fromage mais en y accolant le fumet de la truffe qu'il ne mangera (normalement) pas mais avec laquelle il est possible de le laisser jouer. Quand il sera devenu inégalable à ce petit jeu, vous supprimerez le fromage.

Il sera très déçu et vous regardera d'une drôle de façon la première fois !
Mais vous lui donnerez aussitôt le fromage de la main, à ce moment là, en le félicitant et il comprendra vite que pour avoir le fromage, il doit d'abord trouver la truffe. C'est ce qui s'appelle "payer le chien". Une fois le reflexe pris, on peut changer de friandise, avec l'approbation du chien naturellement !

La répétition régulière des exercices durant l'année est un gage d'efficacité immédiate lorsque la saison commence.

Les trufficulteurs disposant de plusieurs variétés de truffes, matures à différents moments, seront avantagés et n'auront pas de problème à faire fréquemment travailler assistant. Pour les autres, l'emploi de substitut de truffe comme le Canitruffe (huile aromatique incomestible) permettra, à moindre coût, de répartir les exercices durant la morte saison.

Il faut noter que ce produit fonctionne également très bien durant toute la phase du dressage. L'alternative est de conserver au congélateur des truffes impropres à la consommation pour les entrainements mais à vrai dire … il sera plus utile de s'en servir pour réensemencer les arbres de la plantation.

Attention : un chien bien dressé vaut ensuite son pesant de truffes et se vole de plus en plus souvent : voir les articles de presse sur internet pour information.
 
Les outils :
Nous clôturerons enfin ce folio avec quelques mots sur les outils utilisés pour caver le précieux tubercule.

Au gré du temps, de multiples ustensiles différents ont été crée, testé et essayé. Les trufficulteurs sont inventifs et récupérateurs !

Selon les époques, les régions et même les pays, on a retrouvé des sortes de petits couteaux plus ou moins large comme des pelles à tartes, de nombreuses sortes de petites pioches (parfois pliantes), des modèles réduits de pics, des fourches à deux dents à peine plus grosse qu'une fourchette à gigot, des crochets de toutes sortes, des houes ou des sarcloirs miniatures … bref une immense collection uniquement portée, semble t'il, par une imagination sans limite.
Le point commun de cette extravagante panoplie semblant être la taille compatible avec la possibilité de disparaitre prestement dans une grande poche … par discrétion sans doute.

Pour notre usage, nous utilisons la reproduction d'un ancien outil familial que nous avons fait refabriquer selon nos critères d'efficacité. Sa forme s'est bonifiée selon les critères de cavage des générations précédentes.
Un coté pour dérocher, un coté pour déblayer.
Il est court, robuste, et fait merveille dans quasiment tous les sols mais surtout lorsque c'est pierreux.

Vous trouverez ce pic à truffes dans les articles du menu "Autour de la truffe" du site mais rassurez-vous : ce n'est pas l'outil qui fera la récolte !