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Il n'existe pas d'itinéraire cultural type pour la trufficulture.
Pas de système de culture qui, par la mise en œuvre d'un ensemble de combinaisons logiques et ordonnées de techniques, garantisse de contrôler le milieu et d'en tirer une production donnée.
Ces actes agronomiques calibrés et rationnels reproduisant mécaniquement un résultat et qui régissent efficacement la quasi-totalité des productions agricoles fonctionnent beaucoup plus aléatoirement en trufficulture.
On sait assurer la reprise des plants, prévoir les besoins et le développement de l'arbre mais absolument pas garantir l'existence, le volume de la récolte et sa pérennité.
Au fil du temps, une grande richesse de techniques, donnant toutes des résultats dans des conditions particulières, ont cependant été développées.
Aucune n'est universelle et assurée de réussite mais toutes ont donné lieu à production.
En exagérant à peine on pourrait dire que chaque plantation est un cas particulier étant donné que la trufficulture, ultra-sensible à son environnement, est un terrain de recherche quasi-permanent que chacun explore, adapte, et fait évoluer à sa guise, inlassablement.
Toutefois il est possible de dégager quelques bases de départ communes autour desquelles l'ensemble s'architecture, l'utilisation du plant mycorhizé restant la pierre angulaire de l'édifice.
Ainsi et en fonction de différents paramètres comme l'environnement naturel sur lequel sera développé la future plantation (virulence de la présence des truffes), la nature de son sol (terres agricoles, landes, forêt, …), des moyens financiers et techniques à la disposition du porteur de projet, de ses objectifs économiques ou encore de son temps disponible, le choix s'orientera vers des solutions très différentes.
Pour illustrer plus en détail cette situation, voir l'exposé de Pierre Sourzat, technicien spécialisé en trufficulture et enseignant à la Station Truffe du Montat :
Les itinéraires techniques en trufficulture.
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La plantation intensive ou l'approche agricole de la Trufficulture :
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Verger de plusieurs centaines ou milliers de plants installés en terres cultivables avec un objectif de retour sur investissement rapide.
C'est l'arboriculture truffière modèle "Pallier", selon une technique présentée par J. Grente chercheur à l'INRA.
Dans cet itinéraire les interventions humaines sont nombreuses et la conduite globale est très proche de l'arboriculture fruitière à grande échelle. La seule nuance étant que la récolte se trouvera sous la surface du sol.
Les interventions humaines sont très nombreuses car, pour maximiser les potentiels de production, les opérations et temps de travail sont planifiés, segmentés, rationalisés et les taches sont mécanisées au maximum.
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Les coût d'installation et de fonctionnement sont donc élevés mais, théoriquement, absorbés par le volume de la production.
On peut schématiser ce modèle en quelques points :
- Terrain préparé par défrichage, puis labour et passage du vibroculteur pour niveler le sol et détruire les herbacés parasites.
- Plantation mécanisée en haute densité (mini 600/800 plants/ha) et paillage à la dérouleuse tractée comme pour les vignes ou les oliviers.
- Arrosage artificiel (maitrise du climat), rangs de plantation rectilignes et réguliers pour permettre le passage des engins et optimiser les temps d'intervention : taille, soins, entretien, désherbage …
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Toujours pour des raisons pratiques (uniformité du type de taille, homogénéité du besoin en arrosage ou en soins …) la plantation sera souvent monolithique : une seule espèce d'arbre choisie pour son adéquation la plus proche avec le binôme sol/climat.
C'est ce type de plantation intensive, qui se rencontre peu en France mais plus souvent en Italie/ Espagne et enfin régulièrement en Australie et Nouvelle-Zélande.
Les parcours culturaux de ces exploitations sont très techniques, gourmands en moyens mécaniques et essentiellement portés par les professionnels de l'agriculture. Ceux-ci connaissant parfaitement leur métier nous ne nous étendrons donc pas en détail sur les dispositions à mettre en œuvre.
Voir sur quelles bases s'est construite la trufficulture moderne dans ce dossier de l'INRA :
Perspective pour une trufficulture moderne
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La plantation extensive ou l'approche sylvicole de la Trufficulture :
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Dans ce cas il s'agit de valoriser des sols, superficiels ou escarpés, mais globalement inadaptés à l'agriculture et souvent déjà occupés, au moins partiellement, par des forets primitives à réhabiliter ou des bois artificiels à rénover.
Ce modèle, initialement défini par Christian Malaurie, associe dans la gestion durable d'un peuplement d'arbres une double vocation de profit : du bois sur son cycle habituel d'exploitation, additionné d'une production de truffes durant la plus grande partie de ce cycle.
Il se caractérise par une conduite naturelle et un entretien réduit, la truffe étant alors considérée comme un produit forestier et sa culture une sylviculture truffière.
Concrètement les truffes vivent déjà en symbiose avec des espèces d'arbres de nos bois. Lorsque les conditions pédologiques et climatiques lui sont favorables il est donc parfaitement possible d'utiliser les versions mycorhizées de ces plants forestiers.
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Le surcoût spécifique reste contenu puisque les plants truffiers sont introduits progressivement, suite aux coupes de régénération.
De plus et souvent, seul un ratio d'arbres mycorhizés est retenu lors de la plantation, par ex. 1 sur 2 en mosaïque.
Comme dans les pratiques des premiers trufficulteurs de l'histoire, au XVIIIs, les densités de plants à l'hectare sont relativement élevées au départ : il faut en effet donner matière aux coupes futures qui alimenteront la production de bois.
Le travail du forestier consiste ensuite à sélectionner le bois d'exploitation en organisant les éclaircies autour des arbres producteurs de truffes pour créer et maintenir l'indispensable ouverture du milieu.
Les rendements de production truffière à l'hectare sont sans doute inégaux et globalement plus faibles que dans une culture dédiée mais ils sont compensés par les revenus du bois et un coût de revient moindre puisque très peu de travail est nécessaire : en moyenne le seuil de rentabilité de ce type de plantation est atteint à partir de 10 arbres producteurs à l'hectare.
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Cette sylvi-trufficulture représente une solution intéressante pour les propriétaires de forêts qui ambitionnent l'obtention d'un produit final à forte valeur ajoutée. Surtout si on intègre dans le résultat de l'objectif d'autres vertus de grandes portées écologiques comme la restauration des paysages, l'entretien de la biodiversité, la protection des sols, de l'eau, de l'air et des espèces faunistique et floristiques sauvages …
Nota : Les propriétaires privés délèguent souvent la gestion de leur bois et forêts à des organismes tiers (ONF, CNPF, FPF, …) qui s'occupent de la totalité de la logistique (plantation, entretien-éclaircissement, coupe et vente du bois) mais peuvent tout à fait choisir la nature du peuplement de leurs parcelles.
Voir un dossier parut dans la revue du Centre Régional de la Propriété Forestière :
Sous les forêts, la truffe ...
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La plantation jardinée ou la Sylvi-Trufficulture :
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Ultime évolution de la technique précédente dont elle reprend les principes d'optimum écologique, de biodiversité et d'enjeux environnementaux, elle s'adresse cependant à des surfaces plus petites : en général jusqu'à 1ha maximum d'un seul tenant.
C'est la truffière par excellence que beaucoup de trufficulteurs entretiennent avec passion.
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Il s'agit d'établir un habitat favorable à la truffe, inspiré des données de l’écologie des truffières naturelles avec des arbres d'âges variés, des strates de végétation et différentes espèces végétales susceptibles de favoriser les interactions de la truffe avec son écosystème.
Il peut s'agir de plantations nouvelles, de rénovation d'anciennes truffières ou encore de restauration d’éléments fixes paysagers (haies, bosquets ...) mais dans tous les cas ces plantations font l'objets des soins les plus attentifs de leur propriétaire : apport de nouvelles spores et travail soigneux du sol sur les brûlés, taille millimétrique, enherbement maîtrisé, prise en compte des périodes critiques comme la période estivale (risques de sécheresse) ou hivernale (risque de gel).
La plupart du temps, conduite en respectant la pelouse calcicole (modèle "Tanguy") ces plantations sont associées à une sélection de plantes accompagnatrices favorables à la truffe (arbousier, genévrier, olivier, romarin, …) et parfois même avec des plantes médicinales (lavande, thym, ciste ..) qui peuvent faire l'objet d'une exploitation complémentaire.
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Même si ces plantations sont de petites tailles, elles offrent très souvent des rendements à l'hectare largement supérieurs aux autres modes culturaux vus ci-dessus : la truffe adore que l'on s'occupe d'elle avec soin et attentions !
Voir un exemple, appliqué à la Tuber Uncinatum, publié par l'Office National des Forêts dans sa revue "Les Rendez-vous Techniques" :
La Sylvi-Trufficulture et la truffe de Bourgogne.
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